Leadership: une question de capacité... et de volonté

Sylvain Guimond, docteur en psychologie du sport

« Je voudrais devenir le capitaine de mon équipe. » Ce souhait exprimé par plusieurs jeunes du hockey mineur à travers la province est-il envisageable pour tous ? Oui, mais avec des bémols, souligne le titulaire d’un doctorat en psychologie du sport, Sylvain Guimond. Décortiquons un peu ce joueur aux responsabilités accrues dans le vestiaire en compagnie d’un auteur chevronné en matière de psychologie sportive.

 

Jasmin Leroux | Collaboration spéciale

 

Un leader dans une équipe de hockey – ou dans tout autre sport, d’ailleurs – doit d’abord et avant tout être un meneur qui est suivi et respecté de tous, sans avoir à le demander.

 

« Le leadership, c’est quelque chose que je ne peux pas demander ou exiger, c’est quelque chose que mes coéquipiers m’offrent », détaille d’abord M. Guimond.

 

Capitaine de son équipe de hockey est un rôle et un titre plutôt prestigieux pour la plupart des jeunes qui se voient offrir le C par l’entraîneur au mois de septembre. Il vient avec beaucoup de responsabilités, mais il vient d’abord et surtout avec un respect que ses coéquipiers offrent au nommé. Un respect qui s’est gagné au fil du camp d’entraînement, ou des dernières années, où les jeunes ont évolué ensemble.

 

On en revient maintenant à notre exemple cité plus haut. Un cas de figure d’un jeune qui, après quelques années à voir les autres être les meneurs du groupe dans l’équipe, se dit qu’il aimerait lui aussi devenir capitaine. Est-ce possible de développer des capacités de leadership, ces qualités si difficiles à définir et qui, bien souvent, sont innées?

 

« Les capacités de leader viennent à 50 % d’un côté inné, et à 50 % d’un côté qu’on peut développer », rappelle l’auteur de plusieurs livres de psychologie sportive, dont Le hockey, c’est dans la tête.

 

Six qualités pour devenir le leader dont on rêve tous

 

Et lorsqu’on parle des qualités qui peuvent se développer, elles sont nombreuses et se déclinent de plusieurs manières. La première dont on peut parler, c’est celle des connaissances dans le domaine dans lequel on évolue, c’est-à-dire, dans ce cas, le hockey. Le QI connaissance, où le jeune démontre qu’il sait de quoi il parle lorsqu’il explique à des coéquipiers de bons ou de moins bons coups lors de la dernière partie ou à l’entraînement.

 

Un autre point concerne davantage ce qu’on peut créer, comme la relation avec les coéquipiers. Être un bon leader et un capitaine, c’est être sociable, c’est être quelqu’un qui parle avec les autres, qui arrivera à les motiver et à parler dans un vestiaire lorsque ce sera nécessaire. Bien que les leaders sportifs soient parfois des « forces tranquilles », ils doivent aussi être en mesure de prendre la parole au moment opportun. 

 

L’humour peut également résoudre bien des sources de conflits ou désamorcer des problèmes. Le leader dans le vestiaire d’une équipe gagnante doit être quelqu’un qui est capable de ne pas se prendre au sérieux, de rire de soi et de rire avec ses coéquipiers. Les moments de concentration sont importants et obligatoires dans un environnement compétitif comme le hockey, mais sans un peu d’humour et de dérision dans les moments visant à faire descendre la pression, on ne peut arriver à des succès qui s’inscrivent dans la durée.

 

« C’est l’une des qualités à laquelle on pense peut-être le moins, mais qui est très importante aussi, et ce, qu’on évolue dans un vestiaire de joueurs de 12 ans ou de 35 ans », rappelle Sylvain Guimond.

 

« Une autre des qualités nécessaires, et je l’aime beaucoup celle-là, c’est celle de se remettre en question. On doit être capable de se poser des questions à soi-même, de douter, de se demander si l’on a pris la bonne décision », souligne le principal intéressé.

 

Après tout, celui qui croit tout savoir et qui croit être en mesure de prendre le dessus sur n’importe quelle situation sans avoir à demander s’il n’a pas fait un erreur va probablement directement dans un mur à long terme. Ça revient un peu à celui qui croit avoir toujours raison, un défaut rarement apprécié, que ce soit dans le sport ou ailleurs dans un collectif.

 

Et finalement, la dernière et celle qui est peut-être la plus difficile à développer, c’est d’être quelqu’un d’émotionnel. Quelqu’un capable de laisser ses sentiments prendre le dessus quand c’est nécessaire, dans un grand moment d’un tournoi ou d’un match de hockey.  D’être capable de communiquer à ses coéquipiers, via ses émotions, son désir de vaincre ou de faire comprendre l’urgence du moment présent. Une capacité qui, oui, est peut-être un peu innée, mais qui se développe également avec le temps lorsqu’on accepte de laisser ces fameuses émotions prendre le dessus.

 

Le leader négatif, un terme qui ne devrait pas exister

 

« Je n’ai jamais aimé le terme leader négatif, parce qu’être un leader, c’est positif, souligne Sylvain Guimond. Mais c’est vrai que parfois, dans un groupe, il y a ces personnes qui tirent vers le bas. Il faut se dire que dans une équipe de hockey, il y a peut-être 60 % des gens qui vont tout simplement suivre les autres, 20 % qui vont tirer l’équipe vers le haut et 20 % qui vont la tirer vers le bas, souvent sans le vouloir, mais simplement avec des agissements ou des paroles. Il faut arriver à convaincre le 60 % du milieu de suivre vers le haut pour avoir du succès. »

 

Une règle mathématique qui semble élucider bien des problèmes dans un vestiaire lorsqu’on la comprend et qu’on l’assimile. Ces leaders négatifs sont rarement véritablement mal intentionnés. Ils sont, la plupart du temps, malhabiles et veulent le bien de l’équipe, mais selon leurs règles et leurs principes.

 

On doit donc identifier ce fameux 20 % qui tire vers le bas et réussir à le convaincre de remonter dans le groupe qui tire vers le haut. Les moyens pour y arriver sont multiples. Par exemple, faire sentir le leader négatif utile au groupe, et ce, avec l’aide des leaders positifs. Si ces derniers réussissent à inclure leurs coéquipiers récalcitrants dans leur effort de motivation de l’équipe, cela aura un impact positif sur le reste des troupes, qui n’attend bien souvent qu’un meneur. En terminant, rappelons que dans plusieurs cas, les leaders négatifs sont en fait des gens dotés d’excellentes qualités de meneur, mais qui n’arrivent pas à canaliser leur désir de vaincre et d’avoir une équipe performante dans des gestes ou des paroles qui seraient utiles au collectif. Définitivement, ce n’est pas en démotivant les autres qu’ils parviendront à améliorer leur sort.

 

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