Blogue Pierre Houde | Le Canadien « sort de la boîte »

La nomination de Kent Hughes au poste de directeur général du Canadien a créé la surprise chez certains observateurs et partisans de l’équipe. Pour d’autres, c’était un coup non seulement planifié, mais même annoncé d’avance. À travers ces réactions diverses se dégage un consensus: avec cette nomination, le Tricolore prend une direction complètement nouvelle et «sort de la boîte», comme le veut l’expression populaire.

 

Pierre Houde | RDS

Collaboration spéciale

 

Il y a d’abord eu le congédiement de Marc Bergevin. Puis, la recherche d’un nouveau grand patron du volet hockey, qui s’est arrêté sur Jeff Gorton, un Américain pur laine. Ensuite, la conférence de presse de Geoff Molson, où il a présenté son nouveau bras droit en affirmant haut et fort qu’il lui confiait trois missions aussi cruciales qu’indiscutables : améliorer de façon substantielle le recrutement, le développement et l’encadrement des joueurs du Canadien, dans un souci global de moderniser la « culture d’entreprise » de la plus glorieuse franchise de la Ligue nationale. Dans le même souffle, il y a eu l’aveu de chercher un directeur général obligatoirement bilingue, qui pourrait à la fois compléter, complémenter et même « défier » positivement son patron. Et quelque part pendant ce point de presse, un indice important quant à la suite des choses : l’intention de chercher la perle rare même en dehors des sentiers battus, y compris chez les agents de joueurs. L’avertissement était lancé. Il fallait s’y préparer !

Sans enlever le moindre crédit au long processus qui a mené à la nomination du Montréalais Kent Hughes au poste de DG du Canadien, et tout en reconnaissant l’immense valeur des candidats qui ont été rencontrés par le comité chevronné mis sur pied par la haute direction, il y a fort à parier que dès l’acceptation de son nouveau poste avec le CH, Gorton avait clairement identifié sa cible dans sa tête. Et à travers les différentes discussions en privé avec Geoff Molson, il lui a sûrement confié qu’il pourrait très bien favoriser cette piste, d’où cet aveu lors de sa nomination.

 

L’encadrement d’abord

Il est intéressant de chercher à deviner comment cette nouvelle direction bicéphale va œuvrer, autant sur les grands axes décisionnels que dans les opérations quotidiennes. À n’en point douter, depuis la date de son entrée en scène, le 28 novembre dernier, Jeff Gorton a fait de grands pas dans l’évaluation de sa nouvelle équipe et sans dénigrer l’apport du nouveau DG, qui aura certainement un rôle important à y jouer, on peut conclure que ce travail est certainement avancé. En maintenant Martin Lapointe en place, on s’est aussi assuré de garder une ressource importante qui connaît très bien les joueurs, particulièrement les jeunes qui représentent la base de l’avenir de l’équipe. En y ajoutant les autres personnes toujours en place et celles qui viendront se greffer au personnel hockey, on peut penser que les notions de recrutement et de développement reposent déjà sur des plans bien établis.

Vient alors le troisième objectif de Molson : l’encadrement. De tous les éléments du point de presse du 28 novembre, ç’a été, pour moi, le plus intriguant, pour ne pas dire le plus intéressant, et le plus « moderne. » Reconnaître l’importance d’encadrer largement les joueurs et le personnel hockey d’une équipe de la Ligue nationale m’apparait primordial en cette ère où la connaissance scientifique dans le sport s’accélère à grande vitesse, où les tabous tombent sur le plan psychologique et où la vie publique est de plus en plus lourde et exigeante pour ceux qui la vivent en vertu de leur profession. On pourrait certainement ajouter, aussi, en cette ère où on consent des sommes colossales à très long terme à plusieurs athlètes, même à ceux qui sont à peine dans la jeune vingtaine !

Encadrement veut aussi dire l’établissement de valeurs de base pour l’organisation et la volonté ferme d’y faire adhérer ses membres dès leur entrée, leur recrutement ou leur embauche et, ainsi, d’établir des assises claires à toutes les étapes du développement du joueur, et même des entraîneurs.

Or, peut-il y avoir meilleure ressource qu’un agent de joueurs pour réussir cette mission d’encadrement ? Un agent de joueurs expérimenté, respecté de tous, unanimement encensé par ses clients et salué par ses pairs et entièrement respecté par les dirigeants avec lesquels il a transigé dans le passé. Un homme qui a bâti une remarquable carrière en recrutant, guidant, conseillant, écoutant, motivant, protégeant, développant et en mettant au défi tous ses clients, jeunes et moins jeunes.

Voilà, selon moi, ce qui rend l’apport de Kent Hughes aussi inestimable. À ne pas négliger, il est lui-même père de deux jeunes d’âge universitaire qui pratiquent le hockey. Il en est donc à un stade de sa vie où il vit au quotidien avec ces notions d’encadrement, autant sur le plan professionnel que familial.

 

Des atomes crochus acceptables, voire bénéfiques ?

Un mot, en terminant, sur les liens serrés qui unissent Jeff Gorton et Kent Hughes. Certains se sont élevés contre leur proximité. Pourquoi ne pas y voir, au contraire, un raccourci vers des résultats plus probants, plus rapidement ? Dans ces concepts modernes d’établissement de valeurs d’entreprise dont nous parlions plus tôt, n’est-il pas mieux, à court terme du moins, de se rabattre sur des gens qui ont déjà une bonne chimie entre eux et qui n’ont pas besoin de passer par le long processus de s’apprivoiser ?

Le Canadien n’est pas une organisation qui peut se permettre d’attendre encore 10 ans avant de se remettre sur les rails. C’est l’implacable réalité du marché dans laquelle elle opère. Or, en autant que Jeff Gorton et Kent Hughes fassent preuve d’ouverture d’esprit en ouvrant la porte à de nouvelles ressources, essentielles au nouvel essor souhaité, leur complicité naturelle ne peut qu’être un atout à la base.

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